Je bénirai l'heure et le jour
Que je fus à l'amour conforme,
Celui qui languit sans amour
Est un corps privé de sa forme
[Refrain]
Ô dieu quel grand contentement !
Je meurs y pensant seulement.
L'âme influe au corps ses accords,
L'âme l'amour de vie enflamme,
Car l'âme est la forme du corps,
Et l'amour la forme de l'âme,
Ô dieu, quel grand contentement !
Mon servage m'est si plaisant
Et ma prison si agréable,
Que celui qui en est exempt
Je le répute misérable,
[Refrain]
Ô dieu, etc...
Dès que le trait d'amour eut point
Mon coeur d'une plaie profonde,
J'ai toujours dit qu'il n'était point
Un plus doux paradis au monde,
[Refrain]
Ô dieu, etc...
Soit que ma langue au bout glissant,
La lévre de Marthe rabaise,
Ou que goulu j'aille suçant
De son sein l'une et l'autre fraise,
[Refrain]
Ô dieu, etc...
Soit que d'un branle brusque et prompt,
Au combat d'amour je l'anime,
Ou qu'en l'ivoire de son front,
Cent douces morsures j'imprime,
[Refrain]
Ô dieu, etc...
Quand la folâtre se pâmant,
En l'aise extrème qui l'emporte
Me dit d'un langage charmant,
Ô mon doux ami je suis morte,
[Refrain]
Ô dieu, etc...
Quand de même plaisir charmé,
Je reste sans pouls et sans âme,
Et que j'appan* mon coeur pâmé,
Pour trophée au sein de madame,
[Refrain]
Ô dieu, etc...
Quand nous ramassons peu à peu
Notre âme au plaisir égarée
Pour r'allumer un second feu
De l'étincelle demeurée,
[Refrain]
Ô dieu, etc...
En fin recommençant toujours,
Notre aise alors quelle est finie,
Infinis rendons nos amours,
Comme leur cause est infinie,
[Refrain]
Ô dieu, etc...* jète
in Amourettes - Le Banquet des muses (1623)