Ce que Femme désire
Marc Papillon Lasphrise
- extrait -
Outre cela je veux cent baisers douceureux
Comme leurs postillons des plaisirs Amoureux
Communément le pain s'enfourne par la bouche
Un baiser bien donné, un baiser bien receu
Baille l'eau au brulant, baille au frileux le feu,
C'est le cher compagnon de ma belle escarmouche.
Quelque petit larcin, quelque petit débat
Allume bien aussi l'amiable combat,
Quelque riche présent encore plus l'allèche
Ainsi mon favorit gai m'entretiendera
Et de moi (même au jeu) il ne se moquera,
L'un déplait en Amour et l'autre sert de mèche.
Mille beaux petits noms naïvement nommez,
Mille brocards (1) mignons de joie sursemez,
Il me dira sans cesse au milieu des alarmes
Avec un doux support attendant la liqueur
Qui fait ensemblement vivre et mourir mon coeur,
Il temporisera prêt à rendre les armes.
Je ne désire pas que l'on cueille mon fruit
Comme un peuple ignorant dedans l'ombreuse nuit,
Ni comme un courtisan tant à la dérobée.
Au solitaire bois, aux gazouillis des oiseaux
Il me plait fort le jour et le soir aux ruisseaux,
La Reine de beauté naquit de la marée. (2)
J'aime aussi le bocage armé de belles fleurs
Où sont les arbrisseaux, ombrage des chaleurs
Et les joyeux jardins où git le doux silence.
Bref j'aspire le jour les beaux champs écartés
Depuis que les Jumeaux sont plein d'autorité
Jusqu'à temps que la Vierge entre dans la Balance. (3)
Le larcin toutefois, me plait plus plaisamment
Mais je veux qu'en beau lieu il soit pris librement,
Non derrière un vieil huis (4) ou la tapisserie ;
N'est-ce pas violer le saint temple des Dieux ?
Il me faut belle place un lieu délicieux :
En beau lieu la Beauté demande être servie.
Non, non, ces coups larrons hativement lachés
(Semence d'avortons que j'ai tous retranché)
Ne poignent mes beautés friandement sucrines,
Je ne mentirai point : on ne peut voir l'Archer (5)
Délicieusement au combat décocher
Sans l'assuré larcin même sous les courtines, (6)
Là mon plaisir me guide employant bien le temps
Et si je temporise alors c'est que j'attends
Le beau flot Amoureux de la marine enflée ;
Là je vaincs le vainqueur et là superbement
Adextre (7) au jeu d'aimer par un beau remuement
Je me perds, je me meurs en si douce mêlée.
Quelle aise pensez-vous que je recoive après
Quand j'évente hardiment mille dignes secrets
Et mille ardents soupirs messagers de ma flamme
Baignant de pleurs jouyeux ce gracieux séjour
Quand en mourant je vis au paradis d'Amour
Sans redouter l'orgueil du Hasard porte-blâme ?...
Je ne dis toutefois pour ma flamme attiser
Que l'on ne puisse bien un peu se déguiser,
Les Dieux en ont laissé leur superbe semblance,
Mais qu'on se garde de faire un Ixion (8) nouveau
Et pour n'être sujet au sinistre Corbeau
Je veux que l'on m'adore au temple d'assurance.
Encor peut-on donner quelque assignation
(Sous l'ombre aucune fois d'une collation)
Ou de quelque autre point qui me pourrait attraire, (9)
mais on ne dira pas ce bel ajournement
Craignant les suborneurs de mon contentement,
La première vertu c'est de se savoir taire.
Je n'aime ces recoins tant épiés partout
Où plus communément on bataille debout,
Où ne s'éprouve point ma douce-unique envie
Si au commencement l'occasion s'offrait,
J'estimerai un sot qui la refuserait,
La femme au premier choc désire être ravie...
(...)
(1) railleries
(2) référence à Aphrodite qui signifie en grec : née de l'écume
(3) références au zodiaque et aux saisons afférentes : du printemps à l'automne
(4) porte
(5) Cupidon : l'Amour
(6) rideau servant à dissimuler et à décorer un lit
(7) adroit, habile
(8) Zeus trompa Ixion en le faisant s'unir à une nuée
(9) exercer une séduction
Outre cela je veux cent baisers douceureux
Comme leurs postillons des plaisirs Amoureux
Communément le pain s'enfourne par la bouche
Un baiser bien donné, un baiser bien receu
Baille l'eau au brulant, baille au frileux le feu,
C'est le cher compagnon de ma belle escarmouche.
Quelque petit larcin, quelque petit débat
Allume bien aussi l'amiable combat,
Quelque riche présent encore plus l'allèche
Ainsi mon favorit gai m'entretiendera
Et de moi (même au jeu) il ne se moquera,
L'un déplait en Amour et l'autre sert de mèche.
Mille beaux petits noms naïvement nommez,
Mille brocards (1) mignons de joie sursemez,
Il me dira sans cesse au milieu des alarmes
Avec un doux support attendant la liqueur
Qui fait ensemblement vivre et mourir mon coeur,
Il temporisera prêt à rendre les armes.
Je ne désire pas que l'on cueille mon fruit
Comme un peuple ignorant dedans l'ombreuse nuit,
Ni comme un courtisan tant à la dérobée.
Au solitaire bois, aux gazouillis des oiseaux
Il me plait fort le jour et le soir aux ruisseaux,
La Reine de beauté naquit de la marée. (2)
J'aime aussi le bocage armé de belles fleurs
Où sont les arbrisseaux, ombrage des chaleurs
Et les joyeux jardins où git le doux silence.
Bref j'aspire le jour les beaux champs écartés
Depuis que les Jumeaux sont plein d'autorité
Jusqu'à temps que la Vierge entre dans la Balance. (3)
Le larcin toutefois, me plait plus plaisamment
Mais je veux qu'en beau lieu il soit pris librement,
Non derrière un vieil huis (4) ou la tapisserie ;
N'est-ce pas violer le saint temple des Dieux ?
Il me faut belle place un lieu délicieux :
En beau lieu la Beauté demande être servie.
Non, non, ces coups larrons hativement lachés
(Semence d'avortons que j'ai tous retranché)
Ne poignent mes beautés friandement sucrines,
Je ne mentirai point : on ne peut voir l'Archer (5)
Délicieusement au combat décocher
Sans l'assuré larcin même sous les courtines, (6)
Là mon plaisir me guide employant bien le temps
Et si je temporise alors c'est que j'attends
Le beau flot Amoureux de la marine enflée ;
Là je vaincs le vainqueur et là superbement
Adextre (7) au jeu d'aimer par un beau remuement
Je me perds, je me meurs en si douce mêlée.
Quelle aise pensez-vous que je recoive après
Quand j'évente hardiment mille dignes secrets
Et mille ardents soupirs messagers de ma flamme
Baignant de pleurs jouyeux ce gracieux séjour
Quand en mourant je vis au paradis d'Amour
Sans redouter l'orgueil du Hasard porte-blâme ?...
Je ne dis toutefois pour ma flamme attiser
Que l'on ne puisse bien un peu se déguiser,
Les Dieux en ont laissé leur superbe semblance,
Mais qu'on se garde de faire un Ixion (8) nouveau
Et pour n'être sujet au sinistre Corbeau
Je veux que l'on m'adore au temple d'assurance.
Encor peut-on donner quelque assignation
(Sous l'ombre aucune fois d'une collation)
Ou de quelque autre point qui me pourrait attraire, (9)
mais on ne dira pas ce bel ajournement
Craignant les suborneurs de mon contentement,
La première vertu c'est de se savoir taire.
Je n'aime ces recoins tant épiés partout
Où plus communément on bataille debout,
Où ne s'éprouve point ma douce-unique envie
Si au commencement l'occasion s'offrait,
J'estimerai un sot qui la refuserait,
La femme au premier choc désire être ravie...
(...)
(1) railleries
(2) référence à Aphrodite qui signifie en grec : née de l'écume
(3) références au zodiaque et aux saisons afférentes : du printemps à l'automne
(4) porte
(5) Cupidon : l'Amour
(6) rideau servant à dissimuler et à décorer un lit
(7) adroit, habile
(8) Zeus trompa Ixion en le faisant s'unir à une nuée
(9) exercer une séduction
in Diverses Poésies