La reine au masque rouge a passé dans le bal...
Elle a touché les uns de ses ongles en pointe
Et les autres de sa babouche de cristal...
Son frôlement a séparé les formes jointes...
Son passage a fait trébucher dans l'escalier,
Les évêques en mitre et les rois en simarre.
Les noirs valets ont laissé choir les chandeliers...
Le jardin du château s'est empli de fanfares...
Les mornes invités sont devenus hagards.
Ils ont tourné dans un ballet funambulesque.
L'éclat du masque rouge a teinté leurs regards
Et stimulé l’élan de leur danse grotesque.
Une étrange fureur a pris les dominos.
Les Arlequin dans l’air ont fait siffler leur batte,
Les Faust ont transpercé le cœur des Méphisto,
La danseuse a crevé les yeux de l'acrobate.
Elle a tourbillonné dans les groupes épars,
Comme une fleur dansante, imprenable et lascive,
Tendant de ses seins nus la chair brûlante et vive,
Griffant de temps en temps une face au hasard.
Le désir animait les mains lourdes de bagues...
L’un broyait une gorge tendre entre ses bras
Et l'autre déchirait la jupe avec sa dague.
Le sang giclait dans un clinquant de mardi-gras.
Parmi les bijoux faux et la soie écarlate
Deux femmes s'étreignaient en un baiser ardent,
Mordant avec amour leurs bouches délicates,
Écrasant le carmin et le sang sur leurs dents.
Un page lacérait une mauresque brune...
Deux vieillards torturaient un blême adolescent...
Un pierrot fou hurlait comme un chien à la lune,
Sur un balcon ouvert devant des cieux de sang.
Un cortège a paru de moines en cagoule,
Qui chantaient gravement d'obscènes oraisons,
Et les masques comme des grappes qui s'écroulent,
Se vautraient, à ce chant rythmant leur pâmoison.
Soudain, un courant d'air a soufflé les bougies.
L'aurore a rougeoyé dans le bleu des miroirs
Comme un soleil couchant, sur un faste d'orgie...
Devant les portes grimaçaient les valets noirs...
La reine au masque rouge est montée en carrosse.
Et des cors ont joué, parmi les bois prochains,
Un air bizarre et long et tellement atroce
Que les oiseaux sont morts dans les branches des pins.
Le sang sur les parquets faisait de grandes flaques...
Les spasmes, les hoquets et les cris de douleur
Étaient sinistrement mêlés dans un cloaque
De pourpres, de bijoux, de coupes et de fleurs.
Et plus tard, une femme ayant sur la poitrine
Une croix qu'un ivrogne avait faite de vin,
Descendit du perron, toute nue et divine,
Pour se baigner paisiblement dans le bassin...
Elle a touché les uns de ses ongles en pointe
Et les autres de sa babouche de cristal...
Son frôlement a séparé les formes jointes...
Son passage a fait trébucher dans l'escalier,
Les évêques en mitre et les rois en simarre.
Les noirs valets ont laissé choir les chandeliers...
Le jardin du château s'est empli de fanfares...
Les mornes invités sont devenus hagards.
Ils ont tourné dans un ballet funambulesque.
L'éclat du masque rouge a teinté leurs regards
Et stimulé l’élan de leur danse grotesque.
Une étrange fureur a pris les dominos.
Les Arlequin dans l’air ont fait siffler leur batte,
Les Faust ont transpercé le cœur des Méphisto,
La danseuse a crevé les yeux de l'acrobate.
Elle a tourbillonné dans les groupes épars,
Comme une fleur dansante, imprenable et lascive,
Tendant de ses seins nus la chair brûlante et vive,
Griffant de temps en temps une face au hasard.
Le désir animait les mains lourdes de bagues...
L’un broyait une gorge tendre entre ses bras
Et l'autre déchirait la jupe avec sa dague.
Le sang giclait dans un clinquant de mardi-gras.
Parmi les bijoux faux et la soie écarlate
Deux femmes s'étreignaient en un baiser ardent,
Mordant avec amour leurs bouches délicates,
Écrasant le carmin et le sang sur leurs dents.
Un page lacérait une mauresque brune...
Deux vieillards torturaient un blême adolescent...
Un pierrot fou hurlait comme un chien à la lune,
Sur un balcon ouvert devant des cieux de sang.
Un cortège a paru de moines en cagoule,
Qui chantaient gravement d'obscènes oraisons,
Et les masques comme des grappes qui s'écroulent,
Se vautraient, à ce chant rythmant leur pâmoison.
Soudain, un courant d'air a soufflé les bougies.
L'aurore a rougeoyé dans le bleu des miroirs
Comme un soleil couchant, sur un faste d'orgie...
Devant les portes grimaçaient les valets noirs...
La reine au masque rouge est montée en carrosse.
Et des cors ont joué, parmi les bois prochains,
Un air bizarre et long et tellement atroce
Que les oiseaux sont morts dans les branches des pins.
Le sang sur les parquets faisait de grandes flaques...
Les spasmes, les hoquets et les cris de douleur
Étaient sinistrement mêlés dans un cloaque
De pourpres, de bijoux, de coupes et de fleurs.
Et plus tard, une femme ayant sur la poitrine
Une croix qu'un ivrogne avait faite de vin,
Descendit du perron, toute nue et divine,
Pour se baigner paisiblement dans le bassin...
© Maurice Magre
in La montée aux enfers (Ed. E. Fasquelle, 1918)
in La montée aux enfers (Ed. E. Fasquelle, 1918)