Aujourd'hui je suis triste. Ecoute, ô cher potier !
Je t'apporte le don de mon corps tout entier,
Si tu veux avec art, dans ta durable argile
Peut-être, éterniser une forme fragile,
Dans une terre rose et semblable à ma chair
Modèle le contour de mon bien le plus cher :
Mes petits seins égaux aux deux pointes aiguës.
Qu'il reste au moins cela des grâces ingénues
Que j'offre à ton désir, si de chaque côté
De l'amphore funèbre où toute ma beauté
Doit dormir, poudre éparse et cendre inerte et grise,
Au lieu de l'anse, creuse à la main qui l'a prise,
Tu renfles la rondeur de ce double contour
Presque enfantin et prêt à peine pour l'amour.
... Et celui qui, pensif, sous le sol séculaire,
Trouvera quelque jour mon âme funéraire
Saura que je fus femme, et femme tendrement,
Amoureuse et malicieuse par moment ;
Et se demandera devant la terre sombre
Pourquoi tant de clarté dut naître pour tant d'ombre.
Je t'apporte le don de mon corps tout entier,
Si tu veux avec art, dans ta durable argile
Peut-être, éterniser une forme fragile,
Dans une terre rose et semblable à ma chair
Modèle le contour de mon bien le plus cher :
Mes petits seins égaux aux deux pointes aiguës.
Qu'il reste au moins cela des grâces ingénues
Que j'offre à ton désir, si de chaque côté
De l'amphore funèbre où toute ma beauté
Doit dormir, poudre éparse et cendre inerte et grise,
Au lieu de l'anse, creuse à la main qui l'a prise,
Tu renfles la rondeur de ce double contour
Presque enfantin et prêt à peine pour l'amour.
... Et celui qui, pensif, sous le sol séculaire,
Trouvera quelque jour mon âme funéraire
Saura que je fus femme, et femme tendrement,
Amoureuse et malicieuse par moment ;
Et se demandera devant la terre sombre
Pourquoi tant de clarté dut naître pour tant d'ombre.
© Marie Heredia
in Bouquet de Pensées, suite de poèmes parus dans la Revue des Deux Mondes en décembre 1900
in Bouquet de Pensées, suite de poèmes parus dans la Revue des Deux Mondes en décembre 1900