Partager |

Chevaliers aventureux...

Pierre Berthelot
Chevaliers aventureux
Qui, plein d'un feu vigoureux,
Soupirez après les femmes,
Venez éteindre vos flammes
Dans mon giron amoureux,
Car le feu qui vous martyre
N'est qu'une eau que je désire.

 

Venez, accourez y tous,
Et j'aurai pitié de vous,
Vous prêtant une fournaise
Qui recevra votre braise,
Comme miel ou sucre doux,
Car le feu qui vous martyre
N'est qu'une eau que je désire.

 

Bas donc, chausses et pourpoint !
Venez nus, la torche au poing :
Je ne fais que vous attendre.
Tachez de me mettre en cendre,
Mais cela ne sera point,
Car le feu qui vous martyre
N'est qu'une eau que je désire.

 

O, bons Dieux ! quelle liqueur
Qui, me coulant jusqu'au coeur,
Noie de plaisirs mon âme !
De l'appeller feu, ni flamme,
Serait un dire moqueur,
Car le feu qui vous martyre
N'est qu'une eau que je désire.

 

C'est un baume précieux,
Un nectar délicieux,
Une céleste rosée
Dont, pour en être arrosée,
J'abandonnerais les cieux,
Car le feu qui vous martyre
N'est qu'une eau que je désire.

 

Poussez donc hardiment,
Et me mouillez tellelement
Qu'ayant épuisé vos veines
Je ne sois rien que fontaines
D'un si parfait élément :
Car le feu qui vous martyre
N'est qu'une eau que je désire.
in Cabinet satyrique de 1618 - réedité par Fleuret & Perceau (Ed. Librairie du Bon vieux temps, 1924, Vol 1, p. 133 à 135)