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Nue
Sur le carreau plat des cuisines
Debout sur les lièvres sanglants
Sur le vert des poireaux, des feuilles
Blanche et nue dans l'éclat figé
Des chaudrons incurvés, des gerbes
Blanche et nue devant le feu cuit
Sous les oeufs d'astres lourds, les solives de suie
Sous les tresses d'oignons qui jaunissent la nuit
Blanche et nue telle un lait solide
Comme un poisson tendu dans les herbes humides
Avec tes seins hauts, la farine
Des cuisses dans l'odeur marine
Tes longs cheveux croûlant dans le sang de ta bouche
Et tes reins de jument où le fouet fume et touche
Nue dans la porte
Entr'aperçue
Blanche dans le ciel et la pierre
Sous la forêt du toit, dans le vent des murailles
Nue
À te dévaster jusqu'aux semailles
Jusqu'au somme épais du lait d'homme
Des mers
Et du monde des pommes
© Luc Bérimont
in Le Grand Viager  (1954)